
René Mauriès a reçu le prix Albert Londres en 1956. (© Conseil général de la Haute-Garonne/Archives départementales/1 Num 1317)
Lorsque l’on évoque la carrière et la personnalité de René Mauriès, c’est l’occasion de se replonger avec délectation dans l’âge d’or des grands reporters. Celui d’Albert Londres, Joseph Kessel, Lucien Bodard. Autant de figures mythiques de la presse de l’entre-deux-guerres aux années 1960, qui ont « porté la plume dans la plaie ».
Comme ses illustres confrères, ce reporter casse-cou aura « bourlingué » aux quatre coins du monde pendant près de quatre décennies. Une expérience unique qu’il relate dans Le Cap de la Gitane, roman pour lequel il remporte le prestigieux Prix Interallié, fêté en compagnie d’Hervé Bazin, Antoine Blondin et Jacques Chancel.
De la Résistance au journalisme
Originaire de Mirandol-Bourgougnac où il voit le jour le 16 février 1921, petit village tarnais à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de Carmaux, ce fils unique d’instituteurs est biberonné aux idées jaurésiennes et à la république laïque naissante.
À 17 ans, son baccalauréat de Lettres en poche, il monte à Paris suivre une année préparatoire au prestigieux lycée Louis-le-Grand en vue d’entrer à l’École Normale Supérieure. Suite à la mobilisation générale du 24 août 1939 qui l’oblige à revenir dans la région, il s’inscrit à Toulouse en licence de lettres.
Fin 1940, il regagne le Tarn et entre dans un maquis des gorges du Viaur. Un engagement qui lui sert comme « certificat de résistance » et qui lui permet d’obtenir la carte de presse (N°9929, NDLR) en ces temps d’épuration. Pierre Orsini, l’un de ses professeurs de faculté, rédacteur en chef de La République du Sud-Ouest, une des nombreuses « feuilles résistantes », le fait entrer au quotidien en octobre 1945.
Il prend du galon et couvre les manifestations d’octobre 1948 dans les bassins houillers du Tarn et de l’Aveyron.
Le Tour de France et les grands reportages à l’étranger
Comme beaucoup de ses confrères, René Mauriès quitte en octobre 1949 La République et signe à La Dépêche du Midi où il fera toute sa carrière. Chroniqueur judiciaire, du procès Dominici à celui de Klaus Barbie, il est passionné par le Tour de France qu’il couvre à 37 reprises et pour lequel il reçoit en 1974 le Prix Henri-Desgrange de l’Académie des sports.
Rédacteur en chef à partir de 1961, il couvre les voyages présidentiels de Vincent Auriol à François Mitterrand et est envoyé sur les différents théâtres d’opérations, en Indochine, lors de la guerre du Rif au Maroc, en Chine, au Kurdistan, en Iran…
Un prix annuel porte son nom
Lors des dernières années de sa vie, cet observateur privilégié des soubresauts du monde a mis sa passion exemplaire du métier au service des jeunes générations à travers son rôle à l’Ecole de Journalisme de Toulouse (EJT).
Depuis 2005, un prix annuel en son nom est décerné aux jeunes talents de l’Ecole, « une manière pour Bertrand Thomas, le directeur de l’EJT de 1994 à 2018, de rendre hommage à ce pédagogue, ce compagnon qui nous a légué ses valeurs de modestie, de droiture, de rigueur et d’excellence ».
Mathieu Arnal