
Les bureaux de Thierry Lambrecq sont situés à Rouen et à Eu.
En 2015, Thierry Lambrecq créait son entreprise de conseils ActiCap, autour de l’accessibilité des personnes à mobilité réduite et des problématiques liées au handicap. Cette même année, une loi imposait à tous les établissements accueillant du public d’être accessibles aux personnes en situation de handicap. Si beaucoup de commerçants ont entrepris les travaux nécessaires, Thierry Lambrecq confie que parfois, les nouveaux équipements ne sont pas adaptés.
L’Informateur : Pourquoi avez-vous choisi de créer cette entreprise ?
Thierry Lambrecq : Après une période de chômage, je voulais choisir une activité qui avait du sens. Travailler sur le maintien à domicile des seniors et des personnes en situation de handicap me tenait à cœur et cela correspondait au début de la mise en application de l’Ad’ap (voir encadré). J’ai commencé à Dieppe, puis Biville-sur-Mer et nous avons maintenant des bureaux à Rouen et Eu.
Comment réagissent les professionnels qui doivent mettre leur établissement aux normes ?
T.L. : Dans certains cas, il peut y avoir un regard négatif au départ. Mais beaucoup de gérants constatent que les aménagements amènent aussi des clients. La fréquentation augmente parce que globalement, ces aménagements facilitent la vie pour beaucoup. On a tendance à ne penser qu’aux fauteuils roulants, qui ne représentent en réalité que 20 % des handicaps. Il y a aussi les handicaps visuels, auditifs, mentaux… pour tous, des équipements adaptés existent.
Quatre ans après l’application de la loi sur l’égalité des chances aux établissements de 5e catégorie (les commerces de proximité), où en est-on ?
T.L. : Selon la DDTM (Direction départementale des territoires et de la mer) de Seine-Maritime, sur 28 000 ERP (Établissement recevant du public), 12 000 sont conformes. Les travaux concernent souvent les entrées, bornes d’accueil et les toilettes, qui doivent disposer d’une aire de giration et d’accessoires utilisables par tous. Il y a d’autres choses auxquelles on pense moins, comme la présence d’un évier dans la cabine des toilettes, pour que les personnes qui doivent vider une poche puissent le faire dans l’intimité.
J’ai aussi vu parfois des aménagements mal adaptés, comme certaines rampes d’accès dans la rue Paul Bignon par exemple. D’autres commerçants font des aménagements inutiles ou surdimensionnés.
Que dit la loi ?
Depuis le 1er janvier 2015, tous les établissements recevant du public (ERP) doivent être accessibles. Leurs propriétaires ou gestionnaires ont des démarches à effectuer auprès de l’administration. Les ERP qui n’étaient pas aux normes au 31 décembre 2014 doivent faire l’objet d’un Ad’AP, un agenda d’accessibilité programmée. L’Ad’AP est un engagement à réaliser des travaux dans un délai déterminé, de les financer et de respecter les règles d’accessibilité, en contrepartie de la levée des risques de sanction. Ces sanctions sont progressives et peuvent s’appliquer ainsi : rappel à la loi, amende de 1 500 €, puis 45 000 € et fermeture administrative.
Les ERP peuvent obtenir des dérogations, en cas d’impossibilité technique avérée, de conservation du patrimoine architectural, ou si les travaux sont trop importants au regard de la capacité financière de l’ERP (Source : Site du Ministère de la transition écologique et solidaire).
Vous intervenez aussi chez des particuliers. Quelles sont les problématiques ?
T.L. : Des aménagements permettent aux personnes vulnérables de rester autonomes chez elles. Nous travaillons beaucoup avec les seniors. Nous donnons des conseils, pouvons faire des devis et trouver des aides au financement des travaux.
Nous préconisons des aménagements en accord avec la personne. Je pars de ce qui va bien, puis on décide ensemble de ce qui peut être amélioré. La personne doit être actrice du processus, y compris dans des détails comme la couleur, le revêtement… Pour certains, le handicap est associé au fait d’être diminué et au coût représenté par ces travaux, donc on ne vend pas un aménagement comme une véranda, car les gens le font à contrecœur. Une baignoire qu’on enlève, par exemple, peut-être remplie de souvenirs.
Il faut que la personne accepte les changements, sinon elle ne les utilisera pas et son logement devient encore moins pratique qu’avant notre intervention.
Parfois, nous allons aussi chez des personnes âgées qui ont toujours eu une vie rude. Ils se disent qu’ils peuvent faire sans ces aménagements, parce que leurs grands-parents l’ont fait. D’autres décident de le faire plus jeunes, avant de perdre en autonomie.
D’après vous, comment faire en sorte que les questions liées au handicap et à l’accessibilité soient mieux prises en compte ?
T.L. : Il faut d’abord que les personnes valides prennent conscience que prendre une place de stationnement handicapé ou se garer sur un trottoir, ça a un impact direct. Il faudrait qu’il y ait plus de personne en situation de handicap qui soient élues, qu’ils aient plus de pouvoir. On le constate chez les commerçants : ceux qui sont le plus engagés sont ceux qui sont touchés par le handicap, de près ou de loin. Avoir des décideurs qui comprennent ces problématiques permettrait d’éviter beaucoup d’erreurs.
Infos pratiques : L’entreprise de Thierry Lambrecq ActiCap possède un site internet : www.acticap-diagnostic.fr