
Olivier Bérut sort un ouvrage porteur de sens, et y délivre un message positif pour l’année à venir. (©Yann Bar)
À l’heure où l’avenir de l’humanité semble s’assombrir d’un bout à l’autre de la planète, Olivier Bérut, sans angélisme ni optimisme béat, ouvre quelques pistes pour ne pas se laisser piéger par le nihilisme, ambiant et destructeur d’espérance.
Le plan de son ouvrage, La Joie d’être au monde, « manifeste » divisé en trois parties, s’inspire de l’alchimie comme métaphore de la transformation de l’homme. Il renoue avec le symbolisme médiéval pour relire notre monde contemporain. Quoi de plus normal, d’ailleurs, pour un yourcenarien, que d’adresser un clin d’œil au fameux Zenon, personnage du roman de Marguerite Yourcenar L’Œuvre au noir ?
Pour étayer sa réflexion, l’auteur s’appuie par ailleurs sur le Dénombrement de Bethléem de Pieter Breughel l’ancien (1566) du Musée royal des Beaux-Arts de Bruxelles, qui ponctue les trois chapitres du livre et offre ainsi un appui visuel à cette déambulation philosophique. Le musée des Beaux-Arts de Lille (Nord) possède, lui, une version ultérieure de cette même œuvre signée Pieter Breughel le Jeune (1620-30).
Lille Actu : A la genèse de ce livre, il y a ?
Olivier Bérut : Au fil de mes accompagnements professionnels (je suis consultant*), j’ai rencontré trois « tentations » que j’ai aussi reconnues en moi. Le cynisme, qui consiste à faire comme si tout allait bien ; l’égoïsme, qui nous pousse à nous distraire pour oublier ; et la peur, qui nous fait vivre en permanence dans l’inquiétude d’être au monde. Sans nier la rudesse et parfois les horreurs de notre monde, il me semble que nous devons reconnaître ces tentations et les combattre. Dans ce combat, nous luttons aussi contre de nombreux soi-disant « inéluctables » qui nous dépriment. Par exemple, refuser le « on ne peut pas refaire le monde ».
Vos sources d’inspiration ?
Il y en a beaucoup… Dans mes études, j’ai eu la chance de croiser Edgar Morin et les sciences de la complexité, qui permettent aujourd’hui de penser et d’agir sans naïveté, mais avec optimisme. Dans mon parcours professionnel, j’ai aussi dirigé une entreprise en Chine. J’y ai appris que la sagesse orientale nous invite à regarder notre monde, non pas comme une machine, mais comme un être vivant… Cela ouvre de grandes pistes pour en prendre soin. Même si, dans mon parcours personnel, je me suis éloigné de l’Église catholique – avec les enjeux environnementaux, l’égalité hommes-femmes est une question majeure de l’humanité et de notre temps – ma foi chrétienne est restée vive. Je tâche, comme je peux, de rester un compagnon du Christ. Il est évident que cette espérance conduit à la foi et à la charité.
Quelle place occupe la spiritualité dans votre vie ?
Je vis en haut du Mont des Cats, à côté des moines, et je m’y promène souvent en balade méditative avec mes deux bouviers. La spiritualité est ce qui connecte le Bas et le Haut, le Haut et le Bas. C’est aussi ce qui permet de résister à l’aspiration du mal… La prière est pour moi la respiration de l’âme.
Comment se débrouiller aujourd’hui avec les notions de bien et de mal ?
D’abord, en ne les mettant pas sur le même plan ! Le mal n’est pas le simple négatif du bien : il n’est pas l’extrémité d’une ligne, à l’opposé du bien. Le bien et le mal ne sont pas du même ordre. Ensuite, en reconnaissant que, dans notre monde, le mal est excès. Il y a là un mystère évident : le monde, comme exil. Enfin, en s’obligeant, dans un exercice spirituel, à chercher et trouver le bien, lui aussi en excès dans ce même monde. Il y a là le chemin de l’enthousiasme intime puis de la joie collective. Le Beau est pour moi le premier chemin vers le « bien du monde », qui se manifeste alors aussi comme un lieu d’asile.
Réenchanter le monde, oui, mais comment ?
Le réenchantement du monde commence par un travail sur soi. Il ne faut pas nier la part obscure du monde, mais ne pas s’y laisser enfermer non plus. C’est ce que j’appelle dans le livre « l’Œuvre au Noir ». Vient ensuite la recherche pour trouver la Beauté du monde, à l’extérieur et en soi, et renouer ainsi avec l’enthousiasme. Avec « l’Œuvre au Blanc », c’est le temps où la spiritualité est le moteur de l’action. Puis, lorsqu’on a compris quelle part on pouvait accomplir dans le monde pour le parfaire, il faut oser faire cette part qui nous conduira à agir humblement et localement pour faire advenir un monde désirable et passer de l’enthousiasme à la joie. Nous serons alors arrivés au temps de « l’Œuvre au Rouge ».
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Propos recueillis par Françoise Objois
*NDLR Créateur de : On Peut Parfaire le Monde.
Séance de dédicace
Vous pourrez rencontrer Olivier Bérut lors d’une séance de dédicace à Lille, le mercredi 23 janvier 2018, librairie La Procure (31, rue Basse) à 18 h.