
La paille servant à la construction des bâtiments en Hauts-de-France vient directement de sites agricoles de la région. (©Illustration/PxHere)
Avec plus de 100 projets de construction paille, la région Hauts-de-France assure sa place de leader sur le secteur de la construction paille en France. Une tendance qui s’immisce dans les projets des particuliers, dans les collectivités, mais aussi dans le monde de l’entreprise. Comment s’organise la filière dans la région, pour répondre à la demande ?
Professionnalisation du secteur
Avec une augmentation nette de projets de construction paille depuis quelques années (pour 2018 plus de 36 % en un an), la filière se développe dans la région. Une nouvelle économie qui implique de multiples acteurs locaux.
« Il y a des règles professionnelles qui régissent la construction en paille aujourd’hui », explique Julien Lecouffre, responsable du développement local pour Agricultures et territoires (chambre d’agriculture du Nord – Pas-de-Calais).
Lors des Rencontres régionales de la construction en paille, organisées à Roubaix en décembre dernier, cet animateur du GEDA (Groupes d’Étude et de Développement Agricole) du Ternois présentait un secteur comptant de plus en plus d’ouvriers qualifiés.
Depuis 2012, ces règles définies par le RFCP, Réseau français de la construction paille, sont en vigueur. Depuis, 50 personnes ont été formées dans la région.
Une professionnalisation qui permet d’encadrer au mieux la confection de bâtiments en paille, qui peut se présenter sous plusieurs formes. Julien Lecouffre explique qu’ « il existe trois façons d’utiliser la paille dans la construction ». La paille, mélangée à de la terre, peut se transformer en torchis, elle peut être « porteuse » du bâtiment, ou isoler (par le remplissage d’une ossature).
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Nouvelle économie
Pour construire avec de la paille, il faut bien sûr récolter le matériau de base. Un avantage dans les Hauts-de-France, car il est possible de trouver des fournisseurs à domicile ! « Pour une maison de 100 m2, il faut compter environ 8 tonnes de paille », détaille Julien Lecouffre.
Dans les Hauts-de-France, près de 40 agriculteurs sont intéressés par ce débouché. 45 000 bottes de paille seront nécessaires pour les projets de 2019 dans la région. Une forte demande qui implique une organisation plus poussée que l’actuelle.
« Pour l’instant, ça reste assez artisanal. Nous travaillons directement avec l’agriculteur pour chaque commande » explique Frédéric Cousin, maître d’œuvre spécialisé dans l’écoconstruction et l’éco-réhabilitation depuis plus de 10 ans dans la Somme.
Il soulève les freins actuels : respecter des règles professionnelles exigeantes ; garantir un approvisionnement ; mettre en relation les producteurs et maîtres d’œuvre.
L’objectif, en 2019 et dans les années à venir, est de bâtir une filière organisée dans la région.
Frédéric Cousin insiste sur l’avantage d’utiliser des matériaux locaux : « Il faut compter entre 50 et 100 km pour récupérer le matériau. C’est très peu ! »
Un engouement qui pousse à l’excellence
Frédéric Cousin, tout comme Alice Salamon du CD2E*, note un intérêt de plus en plus fort, chaque année, dans la région :
C’est un engouement qui nous motive énormément et nous pousse à faire de la qualité !
Des chantiers qu’il est nécessaire d’adapter, pour proposer un service d’excellence.
Un chantier de construction en paille doit se préparer en amont par le maître d’ouvrage. Parfois, cette solution n’est pas adaptée. Et quand elle l’est, il faut vérifier plusieurs critères.
Le spécialiste donne quelques exemples : la compatibilité du bâtiment, l’accessibilité au chantier, la taille du projet, l’historique des lieux, etc. Des critères auxquels s’ajoute celui du prix.
Alice Salamon nous explique que « construire passif coûte plus cher » en général. La construction en paille s’inscrit dans cette tendance, malgré le prix moins élevé de la paille par rapport aux autres matériaux isolants (comme la laine de verre par exemple).
Selon les indications de Conseil thermique**, ce prix élevé est dû au fait que cette technique d’isolation en paille utilise une quantité plus importante de matériaux, un savoir-faire spécifique et plus d’heures de main-d’œuvre. Alice Salamon souligne que, comme toutes les démarches liées à l’écoresponsable, « ça se réfléchit. C’est un choix très personnel ».
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*Le CD2E (Création Développement des Eco-Entreprises) accompagne les acteurs de l’environnement (entreprises, laboratoires, collectivités) et les filières économiques de la Région vers l’éco-transition.
**L’organisation Conseils Thermiques a pour but de promouvoir la maîtrise de l’énergie et le développement durable à l’échelle de l’habitat. Créée en 2011, elle est animée par un groupe de passionnés, elle informe les particuliers sur les éco-gestes et les guide dans le choix de systèmes performants.