
Aloïse Quesne de Caen (Calvados) est allée au bout de ces très longues années d’études pour devenir docteur en droit. (©M-B/14actu)
Ne rêvez pas, tout n’est pas rose dans la vie d’Aloïse Quesne, ex-Miss et aujourd’hui docteur en droit ! C’est pour cette raison que la jeune femme de 32 ans qui vit à Caen (Calvados), quinze jours seulement après avoir soutenu sa thèse, témoigne en toute transparence de ce véritable parcours du combattant pour arriver jusqu’au titre suprême. Celle qui voue toujours aujourd’hui une admiration sans faille à Geneviève de Fontenay, soutient que de cette expérience de Miss elle a tiré grand profit !
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Miss, docteur en droit : même combat !
Parler en public, marcher avec assurance, surmonter son stress, faire montre d’éloquence et surtout convaincre le jury. À plusieurs reprises dans sa vie, Aloïse Quesne aura dû conjuguer tous ces talents pour être sur la première marche du podium.
C’est vrai qu’il y a de nombreux points communs entre l’épreuve de Miss et celle de la soutenance d’une thèse. La première m’a beaucoup aidée, j’en suis certaine. Même s’il faut l’avouer, quand on a un passé de Miss, les gens autour de vous se montrent très méfiants.

Aloïse a été élue Miss Caen en 2006. (©DR)
Aloïse n’est pas une personne sûre d’elle, mais elle l’assure : « J’ai toujours été au bout de ce que j’entreprenais. Je pense que c’est cela la clef de la réussite. J’ai pour devise d’aller au bout de ce que j’entreprends. »
Le corps et ses mystères
La jeune femme a toujours été passionnée par le corps et ses mystères. L’ex-Miss, sait mettre en avant sa beauté, elle sait aussi que contre cette image superficielle, il faut se battre pour être reconnue par ses pairs. Impossible de ne pas esquisser un sourire lorsque Aloïse annonce son sujet de thèse : « Le contrat portant sur le corps humain ».
Pourtant, rien à voir avec son passé de Miss. « Le corps m’a toujours passionnée c’est vrai, j’aurais adoré faire médecine mais impossible vu mon dégoût pour le sang… J’ai donc décidé de me spécialiser en biomédecine par le droit. Mon sujet de thèse, c’est Gilles Raoul Cormeil, maître de conférences de l’université qui me l’a proposé et je l’ai également préparé aux côtés de René Binet ».
La contractualisation du corps, le sujet m’a passionné et c’est ça qui m’a permis je pense d’aller au bout de ce parcours. Beaucoup n’y parviennent pas faute d’enthousiasme.
Garder les pieds sur terre !
Et de l’enthousiasme il en faut pour ne pas laisser tomber. Pendant sept ans, Aloïse s’est consacrée à ce sujet. La jeune femme ne vient pas d’un milieu aisé. « Il a toujours fallu que je travaille pour financer mes études. » Et comble de malchance : « Je n’ai pas non plus été retenue pour le financement de ma thèse. »
Elle va donc être assistante de justice à la cour d’appel de Caen dès le début de son doctorat. « Depuis sept ans, j’enseigne aussi le droit de l’expérimentation animale à l’université de Caen. » Nouvelle expérience et… nouvelle certitude : « Je veux enseigner, j’en suis certaine ! »
Finalement, ça m’a été très utile. On reproche souvent aux thésards de rester enfermés dans leur bibliothèque. Moi j’avais un lien direct avec la réalité. J’ai eu la chance de ne pas rester figée dans ma bulle…
Car Aloïse en témoigne : « C’est très difficile de garder ses amis, ses proches, surtout pendant les derniers mois consacrés à une thèse. » Un an d’abnégation pour une Miss… Un an et demi pour une doctorante. « Le temps nécessaire à la rédaction de 602 pages… 715 en comptant tout ! »
Certains n’ont pas compris que pendant plus d’un an je ne sois plus dispo pour une sortie ou une soirée. Finalement, aujourd’hui je sais qui sont mes vrais amis, ceux qui m’ont soutenue jusqu’au bout.
Plusieurs concours pour arriver au grand jour
Pour être reconnue, Aloïse en est convaincue, il faut bosser mais aussi savoir se placer au top. En 2014, elle remporte le prix fondation droit animal éthique et sciences. La même année, elle est lauréate 2014 de l’Association française des femmes diplômées des Universités, pour son travail de thèse alors en cours.
À chaque fois, il faut se confronter à un jury, se dépasser pour convaincre. Des étapes nécessaires aussi pour se préparer au grand moment : celui de la soutenance de la thèse.
Une semaine avant l’élection de Miss France 2019, le 7 décembre 2018, la dernière étape du long parcours d’AloÏse est arrivée.
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Pendant 2h30, j’étais devant le jury et derrière moi, il y avait le public. Évidemment j’étais anxieuse.
Le « vote » est sans appel : Aloïse obtient donc le grade de « Docteur en droit privé et sciences criminelles de l’université de Caen. »
Le jury a expliqué que si ça avait été encore possible il m’aurait délivré à l’unanimité les félicitations du jury et proposé ma thèse pour une publication.

Aloïse, le jour de sa soutenance de thèse aux côtés d’Annick Batteur, présidente du jury, Grégoire Loiseau et Gilles Raoul-Cormeil. (©DR)
Se hisser parmi les meilleurs des meilleurs
La jeune femme va donc pouvoir souffler… Eh non, un autre combat s’ouvre pour elle.
Aloïse pourrait avec son grade entrer dans la magistrature, mais elle a choisi un autre parcours. « Je veux vraiment être maître de conférence. »
Là encore, les places sont chères, les postulants nombreux et donc il faut à nouveau se hisser parmi les meilleurs des meilleurs. Miss Monde n’est pas loin !
La semaine qui a suivi ma soutenance, j’ai préparé mon dossier à remettre au Conseil national des universités. C’est un ensemble d’enseignants chercheurs qui reçoivent les dossiers des docteurs qui se présentent à la qualification de la maîtrise de conférence.
Comme pour sa thèse, deux rapporteurs vont une nouvelle fois être désignés « pour évaluer si j’ai l’expérience nécessaire pour être enseignant chercheur. »
Et si Aloïse remporte là encore « la couronne » ? « Alors ce seonta quatre années passées à faire le tour de France comme enseignante dans les universités avant de pouvoir prétendre à un poste définitif. »
La jeune femme prend cette nouvelle « épreuve » avec beaucoup de recul . « J’ai décidé de préparer une thèse parce j’avais cette culture et cette ambition d’apprendre. Le doctorat en poche, je réalise aujourd’hui que j’ai aussi énormément appris sur moi-même. »
Comme si rien ne pouvait plus être insurmontable, comme si le regard des autres à défaut de changer n’était plus l’essentiel.
Le résumé de la thèse d’Aloïse portant sur « Le contrat portant sur le corps humain »
Le corps humain n’a pas échappé au mouvement de contractualisation protéiforme qui se généralise. En ce sens, notre thèse a permis de démontrer l’existence d’une nouvelle catégorie juridique : celle du contrat portant sur le corps humain. Il s’agit d’un genre contractuel qui abrite de nombreuses espèces. La spécificité de ces contrats et l’hétérogénéité des règles qui les gouvernent n’est pas un obstacle à leur systématisation : le contrat portant sur le corps humain est un accord de volontés par lequel l’une des parties met son corps à disposition de l’autre pour l’exécution de la prestation convenue entre elles. En vertu de ce contrat, le cocontractant exerce un pouvoir matériel sur le corps mis à sa disposition. La prestation peut se réaliser sur ou par le corps mis à disposition. Un régime commun a pu être mis à jour. En effet, le législateur prévoit des obligations d’information pour éclairer le consentement de la partie faible, des droits potestatifs extinctifs lui sont également attribués afin que son consentement soit toujours révocable et un encadrement de la sécurité corporelle est nécessairement assuré. Cette étude a conduit à l’élaboration d’une classification des espèces contractuelles, ce qui permet de bénéficier d’une vision d’ensemble de ces contrats et de comprendre que chacun d’entre eux doit s’apprécier suivant l’acte envisagé et le corps mis à disposition. Dès lors, des règles spécifiques s’appliquent, lesquelles sont entièrement dédiées à la protection du corps, dans le respect de la dignité humaine.