
Jean et Brenda Clouet d’Orval, les propriétaires ornais de la grande roue, sont ravis de leur accueil à Alençon. « La Ville l’a réservée depuis un an déjà : Claude Victor était venu nous solliciter à Argentan à Noël, l’an dernier, lors de notre première installation ! » (©L’Orne-Hebdo)
Elle est foraine depuis sa naissance, le 11 août 1972 à Caen. Par son statut actuel et par sa filiation.
« Je suis née Grimaldi, une famille de forains depuis la guerre ! Et, enfant, je fêtais tous mes anniversaires à Saint-Tropez ! », signale Brenda Clouet d’Orval, de son nom d’épouse. Mais elle l’affirme tout de go : elle a choisi cette vie.
Enfance sédentaire
« Je ne subis pas ! », insiste la propriétaire de la Grande-roue installée place La Magdeleine à Alençon jusqu’au 6 janvier. « Dans ma famille, on ne devient pas forain de père en fils ou de mère en fille. Mes parents nous ont laissé le choix ».
Elle a d’ailleurs eu une enfance sédentaire « chez mes grands-parents à Argentan, lorsqu’ils ont arrêté de voyager ». Et une scolarité classique : l’école primaire Vincent Muselli puis le collège Jean Rostand et un bac B (devenu ES) décroché au lycée Mézeray de la même ville. « Sauf que le week-end était pour moi, synonyme de boulot, car j’allais aider mes parents sur les attractions ! », sourit Brenda qui a, via ses vacations, rencontré son futur époux Jean « sur les autos tamponneuses » de la fête foraine de Vimoutiers !
« Il a épousé le métier à bras ouverts ! »
Jean était étudiant en comptabilité, comme Brenda qui, un BTS d’action commerciale en poche, a enchaîné avec une maîtrise de gestion à l’IAE de Caen avant de valider un Master en Angleterre. À l’heure d’entrer dans la vie active, alors que le couple se destinait davantage à une vie professionnelle dans des bureaux, ils ont reçu une proposition de la grand-mère de Brenda. « Elle m’a dit : si tu veux reprendre ma salle de jeux, je te la laisse ! » Ils ont relevé le défi !

La grande roue est sur la place La Magdeleine à Alençon jusqu’au 6 janvier. (©L’Orne-Hebdo)
Et, en même temps que Brenda, Jean « a épousé le métier à bras ouverts ! » Parce qu’il avait envie de grand air.
« Et surtout, il sait se débrouiller et tout faire car dans notre métier on doit balayer comme peindre, conduire des camions comme se dépanner la nuit, monter des vérins, être commerçant… »
Ils ont donc géré la salle de jeu Amusements (du nom de leur société) au gré des fêtes foraines. « On y a des machines à pièces, des jeux arcade et des jeux de cascade mais ils sont en baisse de vitesse depuis l’apparition des consoles ». Puis ont investi dans une seconde, fixe celle-ci, à Ouistreham.
Des clichés bien ancrés
Brenda a choisi son mode de vie. Mais elle ne cache pas qu’à l’énoncé de son statut de foraine, elle affronte encore « certains clichés » bien ancrés dans la tête des gens. « Et parfois, c’est assez blessant », confie-t-elle. « Parce qu’on n’est pas des voleurs de poules ! Et on ne vit pas aux crochets de la société, on n’est pas assistés. Chez les forains, tout le monde bosse. On peut avoir des statuts différents : auto-entrepreneurs ou en société mais il n’y a pas de chômage ! Et on paye des impôts ! »
Voilà qui est dit !
Après 25 ans d’activité et à la quarantaine sonnée, le couple a eu « envie d’autre chose parce que notre activité était développée à son maximum ». Ils ont d’abord songé à racheter une entreprise puis à ouvrir un magasin. Mais, pas moyen : l’idée de se fixer à un endroit les bloquait.
Peuple migrant
« C’est une vie particulière la vie de forains : on vit dans une caravane mais c’est juste une maison qui bouge car on aime le confort ! C’était un cercle assez clos il y a quelques années mais qui s’ouvre désormais sur le monde parce qu’il faut être connecté sur les réseaux sociaux, sur internet et qu’il faut se déplacer en Allemagne, en Italie, aux États-Unis pour acheter du matériel. On est aussi un peuple migrant donc ça nécessite de travailler dans un nouveau contexte à chaque déplacement ».
« Mais, au final, c’est une vie riche de rencontres ! On est deux semaines ici, un mois là, trois jours ailleurs et malgré la courte période, il y a des liens qui se tissent avec les gens. C’est très agréable ! »
Alors, « un jour en rentrant de voyage », ils ont pensé à la grande roue.
« C’est le symbole même de la fête foraine ! Celle de Paris en est la plus belle réussite ! Et elle revient à la mode… »
Ils se sont renseignés, ont monté un projet financier et trois ans plus tard, en avril 2017, Jean signait le bordereau de commande chez un fabricant italien.
1 M € à rembourser sur 7 ans
Peu avant Noël l’an dernier, avec un ami et son beau-frère, il franchissait les Alpes pour en revenir avec trois camions qui contenaient leur grande roue de 32 mètres ! « C’est un rêve ! », lâche Brenda. « Il faut que je me pince quand je la vois pour me dire qu’elle est à nous ».
Un rêve qui endette néanmoins le couple à hauteur d’1M € « sur 7 ans ». Alors autant dire qu’il faut qu’elle tourne. Et pas à vide !
Pourtant, lorsqu’elle accueille les clients depuis sa cabine, Brenda ne fait pas de ce chiffre une obsession. « La grande roue, ça draine des gens, les lumières sont magnifiques, c’est de l’éphémère qui crée de la joie. C’est cela qui nous plaît dans cette attraction : créer de la magie, de la fête et du bonheur. Et on voit des personnes très différentes y monter : des familles avec leurs enfants, des gens seuls, des jeunes, des plus âgées et de toutes les classes sociales ! »

Jean et Brenda Clouet d’Orval, les propriétaires ornais de la grande roue, sont ravis de leur accueil à Alençon. « La Ville l’a réservée depuis un an déjà : Claude Victor était venu nous solliciter à Argentan à Noël, l’an dernier, lors de notre première installation ! » (©L’Orne-Hebdo)
Elle garde néanmoins un œil attentif sur son téléphone à la moindre sonnerie. « On l’a inaugurée à Argentan en décembre l’an dernier. On a enchaîné avec Lisieux, Les Papillons de Nuit à Saint-Laurent-de-Cuves, Bagnoles-de-l’Orne, Beauregard à Hérouville, Courseulles, la foire d’été de Dieppe, la foire agricole de Lessay et les deux jours de Montilly près de Flers avant Alençon. C’est donc très bien pour une première année ».
« Mais c’est nouveau pour nous car autant avec la salle de jeux, on n’a pas de surprise : notre calendrier est plein et bien établi d’une année sur l’autre alors que pour la grande roue, c’est encore l’aventure ! »
Elle sera assurément présente aux papillons de Nuit à la Pentecôte 2019. C’est, pour le moment, la seule date actée à l’agenda de Brenda. « On ne panique pas, on sait qu’elle va être demandée », assure Brenda à l’optimisme rayonnant.
La grande roue bénite
Celle qui aime « se remettre en question à chaque nouvelle installation » s’adapte à la situation. Épaulés par deux salariés (Clarisse et Benjamin), et ponctuellement par ses enfants (Victor (20 ans), Oscar (17 ans) et Charles (11 ans) qui grandissent chez leurs grands-parents à Argentan et déroulent une brillante scolarité classique), Jean et Brenda font face avec le sourire et une foi bien ancrée.
« On est très croyants, ça fait partie de notre vie. L’abbé Gicquel des Touches a d’ailleurs béni la grande roue avant sa mise en service à Alençon ! », précise Brenda.
Que peut-on souhaiter au couple, avec et après la grande roue, désormais ? « Alléluia ! Inch’Allah ! et Mazel Tov ! », répond sans détour Brenda. Comme chaque nouveau matin qui se présente à elle.
Grande roue Amusements, place de La Magdeleine à Alençon jusqu’au 6 janvier. De 11 h à 22 h du dimanche au jeudi et de 11 h à minuit les vendredi et samedi. Réservations de la cabine VIP (avec Champagne) et renseignements auprès de Brenda au 06 86 29 55 33. Site internet : granderoueamusements.com
À deux vitesses
Avis à ceux qui redoutent la panique à bord de la nacelle : « On peut les faire descendre dès le premier tour ». Car le billet d’accès à la grande roue valide, en effet, trois tours. Cette grande roue est accessible à tous : « il n’y a pas de marche pour monter dans les nacelles ». Les fauteuils roulants sont aussi autorisés dans une cabine PMR.
Elle peut être stoppée à tout moment depuis le poste de pilotage de Brenda qui choisit également la vitesse de la grande roue puisque l’attraction en dispose de deux. « Quand il y a beaucoup de monde, on met la plus rapide pour que les gens attendent moins mais la différence entre les deux ne se ressent pas dans les nacelles ».
Sa consommation est d’électricité est faible : 10 € par jour !
Quant à la sécurité, pas de crainte : elle est assurée par Jean. « Il a validé une formation du constructeur avant de la ramener. Il y a une procédure de montage à respecter mais dans la mesure où il sait faire fonctionner un vérin, pour lui, tout cela est logique ! », signale Brenda. Voilà qui devrait rassurer les plus frileux !





