
Gaspard Ulliel et Gérard Depardieu (©Ad Vitam)
Le film
Si la filmographie de Guillaume Nicloux balance davantage vers les films policiers (Une affaire privée (2002), La Clef (2007), le réalisateur français aime aussi se démarquer et aller à la quête des grands espaces. Après la Vallée de la Mort en Californie (Valley of Love (2015) et la forêt de Fontainebleau avec The End (2016), c’est une nouvelle fois le cas avec son dernier long-métrage, Les confins du monde, en salle depuis mercredi, qui plonge le spectateur dans la luxuriante et moite jungle du nord Vietnam. Guillaume Nicloux décrit dans ce film le parcours existentiel d’un jeune soldat en 1945 (Gaspard Ulliel) qui a vécu le pire en Indochine française : la perte de son frère au combat, sous ses yeux. Aveuglé par la vengeance, il s’engage à poursuivre les coupables du massacre qui a causé cette perte. Mais une rencontre avec une jeune Indochinoise (Lang-Khê Than) va contrecarrer ses plans. Au casting, outre Gaspard Ulliel et Lang-Khê Thang, on retrouve le comédien Guillaume Gouix, ainsi que Gérard Depardieu pour sa 3e collaboration avec Guillaume Nicloux (après Valley of Love et The End).
La critique
Nous sommes en mars 1945. L’Indochine française est alors la cible de ce qui reste dans l’histoire comme le coup de force japonais. Un conflit où les troupes nippones prennent le contrôle de l’Indochine et qui va être le prologue de la guerre d’Indochine. Ce contexte est celui des Confins du monde de Guillaume Nicloux. Mais le réalisateur ne signe pas avec son nouveau long-métrage un film de guerre. Ici, la guerre et le colonialisme ne sont que le décor, un personnage. Le vrai sujet des Confins du monde est une guerre, mais elle est interne, existentielle : celle du lieutenant français Robert Tassen (Gaspard Ulliel, habité et surprenant), survivant parmi les morts dans un massacre sanguinaire causé par un lieutenant de Hô Chi Minh. Dès lors, le soldat n’est plus vraiment le même : il est une âme errante en quête d’une vengeance et obnubilé par la mort qui l’entoure. Cela donne un film existentiel, envoûtant, où l’esprit est tourmenté et le corps meurtri dans une jungle poisseuse, moite, hostile (ce qui donne une photographie magnifique à l’ouvrage de Nicloux).
Seul l’amour incarné par une prostituée indochinoise et les fumeries d’opium peuvent faire oublier aux héros de cette guerre sa violence viscérale, omniprésente. Dans cet enfer vert, le protagoniste principal magnifiquement incarné par Gaspard Ulliel trouve sa boussole en la personne d’un écrivain, sage débonnaire (excellent Gérard Depardieu).
En faisant des Confins du monde une expérience méta, sensorielle et intimiste, Guillaume Nicloux réussit un film vaporeux sur fond de guerre qui n’a finalement que peu de choses à envier aux classiques du genre, de Coppola à Malick.
Retrouvez la bande-annonce des Confins du monde
Les confins du monde, de Guillaume Nicloux, avec Gaspard Ulliel, Guillaume Gouix, Lang-Khê Than et Gérard Depardieu. Actuellement en salles. ****